Patrimoine et science.
Dimanche 18 septembre, dans le
cadre des journées du Patrimoine, je me suis rendu à la Station
d’Écologie
Forestière
de l’Université Paris Diderot - Paris7. Voici la visite des laboratoires menée par une dame qui nous donne les explications:
15h33 Devant le bâtiment le plus ancien du campus.Nous sommes ici sur un campus
décentralisé faisant partie de l'Université
Diderot
située en forêt de Fontainebleau, où les étudiants viennent
herboriser, c'est-à-dire apprendre à faire un herbier. Tous les
premières années en biologie viennent passer une journée ici pour
ramasser des plantes et apprendre à les déterminer
A la fin du XIXe, un illustre botaniste, Gaston Bonnier, avait repéré ce bâtiment tout près de la gare, le train étant le seul moyen de transport à l'époque. En l'espace de deux ans - c’est exceptionnel- Gaston Bonnier a réussi à joindre les différents ministères et propriétaires des lieux pour pouvoir commencer les travaux.
A la fin du XIXe, un illustre botaniste, Gaston Bonnier, avait repéré ce bâtiment tout près de la gare, le train étant le seul moyen de transport à l'époque. En l'espace de deux ans - c’est exceptionnel- Gaston Bonnier a réussi à joindre les différents ministères et propriétaires des lieux pour pouvoir commencer les travaux.
De très larges ouvertures pour maximiser la lumière du jour |
Ce bâtiment a été construit
en deux temps, vous voyez d'abord qu’il y a une partie gauche et
dix ans après, l'aile droite a été construite. Mais il a été
pensé dans son ensemble dès le début, on s'aperçoit, quand il
nous arrive de faire des travaux, qu'on est sur un mur de façade
encore plus épais que les autres. On est de toute façon sur des
murs très épais. L'architecte qui a dessiné ce bâtiment, c'est
Mr.
Henri-Paul
Nénot,
le même architecte qui a dessiné la Nouvelle
Sorbonne.
Ce qu'il y a de remarquable
avec ce bâtiment, c'est qu'il a de très larges ouvertures. L'idée
était de maximiser la lumière naturelle pour pouvoir observer les
échantillons dans les meilleures conditions possibles dans les
laboratoires et aussi parce que le bâtiment n'a été electrisé que
vers 1910, donc on n'avait que la lumière du jour pour s'éclairer.
Vous pouvez voir sur la plaque de ce bâtiment qu'il a été inauguré
par le Président de la République de l'époque, Sadi Carnot.
15h36
Dans les Labos. Odeur de neuf,
de peinture fraîche.
Nous vérifions que, même sans
lumière artificielle, et par une journée assombrie par le couvert
nuageux, on peut travailler sans problème sur les paillasses. En
plus, à l'époque, le parquet que vous voyez au-milieu n'existait
pas, il y avaient uniquement des coursives sur les cotés, où il y
avaient les zones de bureaux, ce qui permettait ,
- d'avoir de la lumière dans la partie centrale de la pièce,
- d'avoir des bureaux au-dessus, tout en pouvant surveiller les expérimentations des différents alambics et autres.
Ce bâtiment a été rénové.
La fin de la rénovation s'est
terminée l'an dernier, grâce à des financements de la région et
du département, donc on a pu remettre le bâtiment aux normes, il y
a encore deux ans on était en 110 volts, pour faire de la recherche
, ce n'était pas ce qu'il avait de mieux, on a changé les
paillasses de béton carrelé avec des joints partout par des choses
plus faciles à entretenir.
cliquer pour agrandir |
Ici, ces zones de laboratoires
sont vides car on va pouvoir accueillir des chercheurs travaillant
sur la forêt de Fontainebleau. Ce peuvent être des géologues, des
biologistes , des botanistes, des ornithologues, mais aussi des
sociologues, la forêt de Fontainebleau est très étudiée car c'est
une
forêt
péri-urbaine
avec une fréquentation très particulière, donc
il y a vraiment des choses à faire. C'est un labo orienté sur le
lieu d'étude qui permet à la discipline de venir sur site.
Là sont rassemblés différents
appareils de recherche, ce qu'on apelle des appareils mutualisés, ça
permet aux chercheurs qui viennent ici d'avoir un matériel de base.
15h40
Nous montons des escaliers en
bois, et on s'entasse dans le bureau du créateur de la station Mr.
Gaston Bonnier. Voir sur cette page.
Il a beaucoup travaillé pour
la vulgarisation de la botanique. Par-exemple, il a étudié la flore
des chemins de fer. Il a oeuvré pour que la botanique et les
sciences naturelles soient étudiées dès le secondaire. Il a fait
différentes expérimentations sur les plantes. Il a notamment
découvert ou aidé à découvrir , à propos du lichen
- cet élément végétal qui n'est pas une plante, pas un
champignon- qu’il s’agit d’organismes poussant sur les
rochers et les pierres et qui sont une alliance entre un champignon
et une algue. A l'époque, ce n'était pas du tout évident.
Il a été aussi l'auteur de
différentes Flores,
la Grande Flore illustrée
que vous voyez ici, avec des planches en couleurs, exceptionnelles
pour l'époque, avec un système de clés qui permet de déterminer
les plantes grâce à différents critères. Par-exemple, vous allez
prendre une fleur, vous dites : si elle a trois pétales, rendez-vous
à telle page, si elle a cinq pétales, on va à telle autre
page...et comme ça , grâce aux différents critères, les fruits,
la couleur, on arrive à en déduire le nom de la plante. C'est très
intéressant quand on ne sait pas du tout à quoi on a affaire.
L'important, c'est de savoir se
servir de ces clés. Dans la réalité, ce n'est pas du tout évident,
parce que savoir si la feuille est un petit peu pointue, mais pas
vraiment, avec des écailles ou pas ...Et il y a toujours le problème
de “ l'individu”,
qui est un peu difforme, qui peut nous orienter vers un mauvais nom.
Mais c'est le système qui est toujours utilisé. ça existe pour les
plantes, ça existe pour les insectes, c'est comme ça qu'on peut les
déterminer.
Vous avez ici le bureau de Mr Bonnier, légué par sa femme. Il avait ses appartements ici, même
s'il ne restait pas là toute l'année. Il travaillait aussi beaucoup
à la Sorbonne.
15H48.Retour à l'extérieur; la dame passe en revue le parc et les autres bâtiments.
On est en fauche tardive.
Explications sur les différentes zones de fauche:
Mise en place d'une gestion différenciée4 modes de gestion :Les zones refuges ne subissent aucune tonte ni fauche.Des fauches tardives sont appliquées sur certaines zones pour créer des milieux riches en biodiversité.Des espèces rares nécessitent parfois des fauches spécifiques.Les zones destinées à l'accueil du public requièrent des tontes régulières.ZONES EN FAUCHES TARDIVES
Comment ? Les zones sont fauchées après le 15 septembre avec exportation des produits de coupe.Pourquoi ? Cela augmente le nombre d'espèces animales et végétales qui peuvent se reproduire (papillons, oiseaux, coléoptères).
L'exportation appauvrit le milieu recréant des prairies peu fréquentes et favorise les plantes annuelles rares.Plus d'animaux sont épargnés en privilégiant la fauche à la tonte et en diminuant les passages.Cela implique aussi une baisse des consommations d'essence, des rejets de CO2 et des pollutions sonores.ZONES EN FAUCHE SPÉCIFIQUEComment ? La zone est fauchée régulièrement jusqu'au 1er août puis à partir du milieu de l'automne.Pourquoi ? La spiranthe d'automne apprécie les prairies peu denses , les tontes régulières permettent de limiter la concurrence.Ensuite, il faut laisser les hampes florales se développer. La tonte suivante ne s'effectuera qu'après la dissémination des graines.
Depuis qu'ils ont mis en place
ce système, on note la présence de nombreux
orthoptères,
des sauterelles, des grillons sont présents, alors qu'avant, il n'y
en avait quasiment pas. Si vous venez ici l'été, on entend que ça
chante à peu près du milieu de la rue, et comme la forêt de
Fontainebleau n'a pas beaucoup de prairies assez hautes, ici, c'est donc une sorte d' îlot pour ces insectes.
Pour les allées, on n'utilise
pas de pesticides, pour des raisons écologiques et de recherche. Plus loin, en effet, il y a des parcelles
expérimentales où des pesticides ont été testés, et on ne veut pas
polluer les résultats.
Sur une parcelle spécifique, on
a une plante qui est protégée en région Ile-de-France, une petite
orchidée, la
spiranthe
d'automne
qui fleurit à la fin de l'été, ....
La dame cherche l'orchidée
au-milieu des herbes, le spécimen protégé est tout petit. Elle fait des petites
fleurs blanches en spirales.
On ne la trouve qu'en deux endroits, ici
et sur l'aqueduc de la Vanne. On a une gestion particulière pour
cette plante, il faut faucher régulièrement, car elle n'aime pas la
concurrence. Ses feuilles sont vraiment à la base, donc pour
recevoir la lumière, elle a besoin d'une prairie assez compacte mais il faut
arrêter de faucher début août car la hampe florale commence à
sortir. Si jamais on la coupe, la plante ne meure pas mais elle ne peut
pas se reproduire. Cette année, ce fut un peu compliqué parce que
début août, il a pas mal plu.
On peut refaucher à partir du
moment où la hampe florale a séché.
Derrière, on a les parcelles
expérimentales, des tilleuls en pépinière sur lesquels on a testé
des infusions pour lutter contre les acariens en ville, une
expérience qui a tourné court car les matières actives ont été
retirées de la vente.
D'autres expérimentations pour
les étudiants, on a fait six quadra, deux quadra qu'on retourne et
d'autres pas du tout. C'est pour montrer aux étudiants la succession
végétale.
- Sur les quadra retournées tous les ans, on va avoir les plantes pionnières, qui ont besoin de beaucoup de soleil, qui n'aiment pas trop la concurrence
- Dans les parties tondues, on a des plantes qui ont des cycles de vie assez court, en deux, trois ans on a déjà l'apparition de ligneux. Ces expériences ont le mérite de montrer que chaque plante a besoin d'un milieu particulier.
15H55
On a créé une mare . Une mare
qui permet d'expliquer les différentes techniques d'adaptation des
plantes à l'eau comme des feuilles qui sont cirées à la manière de celles des nénuphars.
et à coté, une mare typique de
la forêt de Fontainebleau, une mare qui va s'assécher l'été. Du moins quand on a des étés sans eau, et là, cet été 2011, elle ne
s'est pas asséchée... Il y a des organismes qui sont adaptés à
cet assèchement, par-exemple des crustacés qui vont pondre dans le
substrat et dont les œufs vont être capable d'attendre des
conditions plus favorables. Mais ce sont des animaux qui ne peuvent
pas se développer autrement qu'avec ce système d'assèchement qui élimine leur concurrence, par-exemple les
poissons qui vont manger les œufs ou les grenouilles obligées
d'aller ailleurs.
16h00 On s'arrête devant le dernier Bâtiment de la
station.
Construit en 1914. Derrière les vitres, (là aussi luminosité maximale) est mise en place une expérimentation pour des étudiants qui viennent mardi
prochain.
C'est un système appelé
appareil
de
berlèse. Il a été inventé pour déterminer la faune présente dans le sol. En effet, il y a des
animaux qu'on voit assez bien, mais il y a tout un cortège de petits
animaux, des petits acariens, qu'on appelle des .....(petits animaux
blancs qui sautent très haut)
C’est un moyen pour trouver
et quantifier ces petits animaux de la façon la plus exhaustive
possible . On prend des feuilles mortes, on les met dans la partie
grise, il y a une grille au fond, un entonnoir, et, en-dessous, un
récipient avec de l'alcool pour conserver les animaux. Au-dessus, on
a une lampe. Les animaux qui vivent dans les feuilles mortes aiment
bien l'humidité et l'obscurité. Les petits animaux vont fuir la
chaleur et la lumière, vont glisser dans l'entonnoir et vont finir
par être pris dans l'alcool...Ainsi, on peut déterminer les
différentes espèces qu'on peut trouver dans ce sol, et la quantité.
Cet appareil permet d'illustrer tous les systèmes de chaîne
alimentaire, de dégradation de la matière organique et de voir qui
participe à cette chaîne alimentaire.
Il faut bien que les feuilles
soient dégradées, sinon, au fur et à mesure des automnes, nous
serions submergées par les feuilles mortes.
Pour avoir quelque chose de
quantitatif, on récolte un mètre carré, on prend d'abord toutes
les feuilles qui sont tombées l'automne dernier, qui sont mortes
mais encore entières, et puis en-dessous, il y a les feuilles
fragmentées, on en récolte aussi un mètre carré parce qu'on
suppose qu'il n'y a a pas les mêmes insectes, donc la couche
inférieure et la couche supérieure.
D'habitude, on fait aussi
l'humus, mais en forêt de Fontainebleau, c'est du sable, et le sable
glisse dans l’entonnoir, donc, on évite.
Pour finir, elle nous parle de
l'hébergement qui va être créé et situé sur cette partie de la
station :
On
est parti sur un hébergement écologique, en double structure bois,
pour respecter l'histoire du site, des modules de chambre pouvant
accueillir une à trois personnes, ce qui nous permet d'accueillir
des chercheurs en séminaires qui seront à l'aise à une ou deux
personnes par chambre , mais aussi des étudiants (en les tassant un
peu plus),par- exemple pour des semaines d'intégration mais aussi
pour faire de l'ornithologie où il faut être à 5 h du matin sur
le terrain.
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